Une forme possible de RPS
- LNA
- 25 juil. 2016
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D’une pratique professionnelle en pédiatrie aux risques psychosociaux.
Notre propos s’appuie sur une recherche qualitative de type ethnographique : l’étude RESPECT (Réflexion Ethique Soignante sur la Prévention de la ConTention).La pratique de la contention forte était considérée par l’ensemble des participants comme une difficulté fréquente. Les participants déploraient le cas échéant l’utilisation de la contention forte mais n’imaginaient pas tous des alternatives. L’intérêt supérieur de l’enfant justifiait systématiquement l’usage de la force. La priorité allait à l’exécution du soin. Pourtant l’évocation du sujet déclenchait toujours gêne, malaise et émotions. Le soignant occultait volontairement son empathie pour être en mesure de poursuivre le soin qui requiert de la contention. Pour illustrer ce phénomène le concept de « cécité transitoire de l’empathie » a été proposé.
Au regard des résultats de cette étude, des risques psychosociaux peuvent se révéler sur plusieurs des dimensions fondamentales définies par le rapport Dares (2010). Ces dimensions sont, la marge de manœuvre, les exigences professionnelles, le conflit de valeurs et les exigences émotionnelles. La réflexion éthique s’exprime tant au niveau individuel (relation soignante) que collectif (question de la souffrance au travail). Les contraintes organisationnelles, hiérarchiques et contextuelles pèsent sur les soignants et limitent l’expression de leur libre arbitre. Cette étude suggère une souffrance latente pour les soignants qui sont fréquemment confrontés à la contention. Or ce phénomène semble faire l’objet d’une forme de déni collectif. Le soignant adhère à la norme collective implicite en sacrifiant sa propre subjectivité. Cette situation « taboue » peut altérer la motivation et le bien-être au travail.
Les normes implicites du groupe influencent considérablement les comportements vis-à-vis des pratiques difficiles.
Questionner collectivement le phénomène de la contention de l’enfant peut aider les soignants à envisager des alternatives, à modifier les stratégies collectives et en particulier à se sentir légitimes de suspendre un soin qui se déroule « mal » plutôt que de le poursuivre. La reconnaissance de l’exposition des soignants aux risques psycho-sociaux liés aux habitudes professionnelles telles que la contention est une étape primordiale du changement. Le développement d’une politique institutionnelle concrétisée par des échanges interprofessionnels, par la formation, et l’édition de recommandations pour limiter et prévenir la contention forte, devrait permettre d’améliorer les conditions de travail. Cette recherche pourrait être modélisée pour s’appliquer à d’autres domaines qui peuvent engendrer des soins difficiles à réaliser tels qu’en psychiatrie et gérontologie.
La réflexion autour de cette problématique nous permet de cheminer vers une éthique commune que nous appellerons: éthique de la responsabilité bienveillante.
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